Ce matin, le Conseil d’Etat a tranché en faveur de la FFF (Fédération Française de Football) dans son conflit l’opposant à la LFP (Ligue de Football Professionnel) en maintenant le système des trois montées et trois descentes entre la Ligue 1 et la Ligue 2. Revenons un moment sur cette affaire et ce qui a amené la plus haute juridiction administrative à statuer ce matin.
La LFP et la FFF d’accord pour un système deux montées-deux descentes dès 2016-2017
Les discussions avaient commencé fin mai, mais ce n’est que le 18 juin dernier que les dirigeants du football français – de la LFP ainsi que de la FFF – se sont mis réellement d’accord pour un système de deux montées et deux descentes entre la Ligue 1, la Ligue 2 et le Championnat National (3ème division). Seulement, ce système ne devait rentrer en vigueur que pour la saison 2016-2017. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’actuellement, les trois derniers clubs de Ligue 1 à l’issue d’une saison descendent en Ligue 2, et à l’inverse les trois meilleurs clubs de Ligue 2 accèdent à la Ligue 1.
Mais pourquoi passer de trois à deux clubs ?
Frédéric Thiriez, président de la LFP, s’en défend en évoquant la protection des investisseurs que sont les clubs de Ligue 1. Il souhaite protéger ces clubs « d’accidents industriels ». Il souhaiterait finalement que la Ligue 1 devienne un championnat un peu plus « select », difficile d’accès. Mais pas de là en le transformer en championnat fermé. Noël Le Graët, président de la FFF, avait notamment déclaré : « Une ligue fermée, jamais ! Même pas en rêve, pour ceux qui souhaiteraient la mettre en place ». De son côté, Guy Cotret, patron de l’AJ Auxerre explique qu’il s’agit davantage d’une question de droits télé. De toute façon, quoique M. Thiriez dise, il est pointé du doigt, il fait partie de ces personnages publics qui ont le don de s’attirer les foudres de l’opinion publique à chaque prise de parole. On se rappelle notamment de cette histoire avant la dernière finale de la Coupe de la Ligue entre le PSG et Bastia où il n’était pas descendu sur le terrain pour saluer les joueurs bastiais avant la rencontre.
Coup de force de la LFP pour une mise en place du système dès 2015-2016 entre L1 et L2
La LFP, qui est en charge du football professionnel (L1, L2 et 4 clubs de National), par le biais de son Conseil d’Administration, est passé en force le 9 juillet pour que le système 2 montées – 2 descentes soit mis en place dès la saison 2015-2016 entre la L1 et la L2. Ce changement ne concernait pas le Championnat National car étant un championnat amateur, il est géré par la FFF. Ainsi, de la Ligue 2 vers le championnat National, les trois descentes étaient maintenues. Il faut comprendre que cette date est extrêmement importante pour le cheminement de notre affaire car elle est celle à partir de laquelle un véritable décalage s’est créé entre les deux grandes institutions du football français.
Annulation du système par la FFF
Réagissant à ce « coup de force » de la LFP, le comité exécutif de la FFF a, le 23 juillet, annulé le principe deux montées-deux descentes entre la Ligue 1 et la Ligue 2 pour la saison 2015-2016. Le 18 juin, les deux institutions s’étaient mises d’accord pour repousser la mise en place du système pour la saison 2016-2017 afin de se laisser le temps d’harmoniser les calendriers à tous les niveaux. Mais le 9 juillet, la LFP a agi par ses propres moyens pour avancer l’entrée en vigueur du système mais seulement pour la L1 et la L2. Forcément, les clubs de L2 se sont sentis lésés et pour cause : deux montées contre trois descentes. Ils se sont donc tournés vers la FFF qui a en charge le Championnat National ainsi que les montées et descentes avec la L2. Cette dernière a répliqué immédiatement en annulant la décision du Conseil d’Administration de la Ligue, et elle a statutairement droit de le faire, il n’y a pas de problème de ce côté-là. Consécutivement à cette annonce, Frédéric Thiriez a immédiatement réagi en déclarant qu’il saisissait immédiatement en référé le Conseil d’Etat pour une demande de suspension de la décision de la FFF.
Démission de 19 clubs de Ligue 1 de l’UCPF
L’Union des Clubs Professionnels de Football (UCPF) est un syndicat patronal représentant les clubs de football français possédant un statut professionnel. Il réunissait jusqu’à récemment l’ensemble des clubs de Ligue 1 et de Ligue 2. Mais le 11 août, l’ensemble des clubs de Ligue 1, à l’exception de Guingamp, ont décidé de quitter l’UCPF pour former un nouveau syndicat professionnel. Cette décision est directement liée au bras de fer LFP/FFF que nous venons de détailler. En effet, les intérêts entre clubs de L1 et de L2 divergent clairement sur ce sujet : les clubs de L1 sont nécessairement favorables à la mise en place du principe 2 montées-2 descentes alors que les clubs de L2 ne le sont pas. Chacun défend ses « petits » intérêts et personne n’est prêt à faire de concessions donc cette décision prend tout son sens. Le communiqué des clubs de l’élite souligne notamment que « la Ligue 1 ne souhaite pas avoir à remettre en cause les principes de solidarité y compris financière avec la Ligue 2, mais veut la liberté de mettre en place les réformes indispensables au développement de notre football pro français ». Nous pouvons aussi relever les propos croustillants de Waldemar Kita, le président de Nantes, qui s’est exprimé dans ces termes : « On a démissionné collectivement de l’UCPF parce qu’on n’a aucun pouvoir ! Nous, présidents de Ligue 1, on ne peut décider de rien puisque la Fédération peut tout remettre en cause à la fin. L’organisation du foot en France n’est pas adaptée à l’époque que nous vivons. On ne peut plus fonctionner sur un modèle qui date d’il y a cinquante ans ». Cette déclaration vient surtout tacler le choix de la FFF d’annuler la décision de la LFP du 9 juillet mais elle met aussi en exergue les dysfonctionnements actuels du football français dans son organisation.
La décision du Conseil d’Etat en faveur de la FFF
Le Conseil d’Etat, saisi de deux requêtes en référé (l’une de 14 clubs de L2 et d’un club de National contre la décision de la LFP ; l’autre de la LFP contre la décision d’annulation de la FFF) ce 13 août, a maintenu le système des trois montées et trois descentes entre la L1 et la L2. Mais cette décision ne met pas pour autant un terme au conflit. En effet, un jugement sur le fond devra intervenir d’ici 3 à 5 mois. Mais le Conseil d’Etat l’a affirmé, « jusqu’à ce que le Conseil d’Etat se prononce sur le fond de l’affaire, la décision de la Fédération s’applique ». Mais pour Frédéric Thiriez, « ce n’est que partie remise ».
A suivre…